Les sources de la vie

Trois, un chiffre qui appartient à la vie et qui nous propulse au-dessus de la polarité du bien et du mal, pour se placer entre cette dualité (santé-maladie) et la quaternité, symbole du quadrillage matériel de la réalité. La trinité devient ainsi 3 x 3.

Trimūrti : rythmes divins et cycles de transformation vivante

1. Une cosmologie du mouvement

La pensée hindoue ne conçoit pas l’univers comme une machine figée, mais comme un souffle. Le monde n’est ni créé une fois pour toutes, ni linéairement orienté vers un but, mais éternellement en cycle, en pulsation, en respiration cosmique.

C’est ce que représente la Trimūrti, trinité sacrée formée de :

  • Brahmā, le créateur, souffle originel de la manifestation
  • Vishnou, le conservateur, gardien de la forme et de l’équilibre
  • Shiva, le destructeur, principe de transformation et de renaissance

Ces trois figures ne sont pas des personnes, mais des forces universelles qui opèrent à toutes les échelles : du cosmos à la cellule, du mythe à la clinique.

« Le monde n’est pas une chose, mais un rythme. »
— Upanishad (attribué)

2. Une lecture thérapeutique de la Trimūrti

Dans ma pratique, je perçois chez chaque patient un cycle vivant, plus ou moins conscient :

  • Une phase de rupture, de symptôme, d’effondrement (Shiva)
  • Une phase de stabilisation fragile, d’organisation du chaos (Vishnou)
  • Une phase de réémergence de quelque chose d’autre (Brahmā)

Chaque consultation devient alors un espace où ce rythme peut être respecté, parfois simplement accompagné.

La guérison, dans cette perspective, n’est pas un retour à l’état antérieur, mais une mutation cyclique vers un nouvel état d’être. Il ne s’agit pas de nier Shiva, mais d’apprendre à l’écouter.

3. Trimūrti et cliniques du bleu, du souffle, du vide

Je retrouve la Trimūrti dans plusieurs gestes de ma pratique :

  • Shiva agit dans le choc, le symptôme, le déplacement soudain du sens.
  • Vishnou veille dans l’espace de réorganisation : écoute, retour à l’axe, cohérence.
  • Brahmā se tient dans l’émergence : nouvelle parole, nouveau souffle, nouvel état.

Le bleu de méthylène, par son pouvoir d’éveil et de réorganisation, touche souvent les deux extrêmes : Shiva (implosion), puis Brahmā (nouvelle structure).

La dynamisation homéopathique suit ce rythme : agitation (Shiva), stabilisation rythmique (Vishnou), dilution/naissance d’une nouvelle information (Brahmā).

4. Trimūrti, Kairos et syntropie

Le Kairos est souvent le moment de passage entre deux phases du cycle : le juste instant où Shiva peut être reconnu sans peur, où Vishnou peut apparaître comme soutien, où Brahmā peut être accueilli.

La syntropie, force de cohérence et de forme, est alors la trame silencieuse sur laquelle cette trinité opère. Sans syntropie, pas de renaissance. Sans Kairos, pas de bascule. Sans Trimūrti, pas de cycle.

5. Une conclusion incarnée

La Trimūrti me rappelle que la médecine n’est pas un acte de volonté, mais une danse avec des forces plus vastes que soi. Elle invite à reconnaître les moments de fin (Shiva), les équilibres temporaires (Vishnou), les recommencements (Brahmā).

« Quand quelque chose s’effondre, ce n’est pas la fin. C’est Shiva qui ouvre le passage. »

Guérir, alors, n’est pas guérir de quelque chose, mais guérir à travers quelque chose, en suivant le rythme même de la vie.